La “une” de ce vendredi du “grand” quotidien régional titrait “Le Var moteur du logement social en PACA”. Pour de l’info, c’est de l’info. Les quelques 25 000 demandeurs qui désespèrent de se voir attribuer un logement social ne doivent cependant pas s’exciter.
Le texte reconnaît que “la demande de logements sociaux ne faiblit pas. Elle a même progressé de 10% cette année.” Serait-il “objectif”? Pas vraiment. Pour cela il faudrait qu’il relativise même si 2018 a été meilleure que 2017, notamment en Dracénie et dans l’Est-Var et que 3075 logements sociaux ont été livrés, après une année 2017 très en deça.
Il en faudrait près du triple chaque année -et on n’en prend pas le chemin- pour respecter la loi SRU et répondre aux attentes des ayant-droits qui sont ainsi dissuadés par les délais d’attente.
Ce palier atteint ne permet toujours pas de rattraper le retard accumulé dans le Var même si bien d’autres départements et communes sont à la traîne. Le phénomène est national mais encore plus sensible dans quelques régions, PACA en fait partie.
Ce qui est vraiment tendancieux dans le titre c’est de faire un “moteur régional” de la construction de logements sociaux d’un département dont 40 communes entrant dans la loi SRU, sont pour la plupart très loin de l’objectif fixé par la loi des 25% de logements sociaux locatifs.
Comme si ce quotidien se faisait un devoir de faire plaisir aux élus LR -mais pas que- qui tiennent les rênes de la région, des départements et d’une grande majorité de communes qui, s’ils ne sont pas très engagés dans la campagne des Européennes, le sont bien davantage dans le scrutin qui suivra un an plus tard…plein d’incertitudes. Ils ne pensent qu’à ça.
Au point d’oublier de dire que si le logement social est en carence, ce n’est pas, d’abord, en raison du prix du foncier -ici plus élevé qu’ailleurs certes- qui grève le coût de la construction sociale à but non lucratif, ni de sa rareté, mais dans la quasi généralité des cas, c‘est en fonction d’une hostilité de nature politique dont d’ailleurs pas mal de maires et d’élus divers ne se cachent pas.
Les populations paupérisées, mal logées, donc à problèmes... ne les intéressent pas. Ici, sur la côte et dans son arrière-pays si touristique, on veut attirer des populations de catégories “supérieures” et on construit à tour de bras, du pavillonnaire, même dans des zones inondables, et du collectif qu’on trouve en allant prospecter de petits propriétaires pour reconstituer des parcelles accueillant de plus ou moins grandes co-propriétés.
Il n’y a qu’à voir Toulon et le bétonnage des quartiers périphériques, sans parler de la densité des projets en cours dans la haute ville en même temps que le port, sur lesquels nous reviendrons.
C‘est ce quota de 25% de logements dans tout programme de construction qui est combattu à longueur d’annés à TPM et dans les communes par les majorités de droite et d’autres élus du centre et de l’extrême-droite.
Faut-il rappeler que cette loi du 13 décembre 2000, sous Jacques Chirac en cohabitation avec Lionel Jospin porte le nom de Jean-Claude Gayssot, alors ministre communiste qui visait à faire entrer la mixité sociale dans toutes les communes et donc à modifier l’occupation de l’espace. Ce qui amputait le profit des promoteurs et des constructeurs.
Passé de 20 à 25% en 2013 par Cécile Duflot, ce quota est rendu plus contraignant et des pénalités sont prévues qui font hurler les élus concernés, d’autres préférant les payer pour ne pas avoir à construire du social. Quelle horreur ! C’est un peu comme l’accueil des migrants : qu’ils passent leur chemin.
La loi ALUR ouvrant la possibilité de préempter les terrains. Ces mêmes élus ne sen servent pas.
Et puis Macron est arrivé et leur a montré dans quel sens il entendait orienter sa politique du logement social : baisse des APL, regroupement des offices d’HLM, révision à la baisse des crédits de l’Etat pour la construction sociale, les collectivités et leurs gestionnaires devront réduire leurs ambitions avec leurs moyens. Mais l’ISF ne sera pas rétabli. Les grands patrons du CAC 40 ont les dents tellement longues. Ils possèdent tous les médias ou presque.
Comme pour le rail, la sécu, les retraites, la santé, la fonction publique, le code du travail, la culture etc…on est en marche…arrière vers la privatisation du logement social !
Et comme l’emploi, le pouvoir d’achat, la justice fiscale ne sont pas au rendez-vous, certains dirigeants de droite dont une partie a déjà rallié le très libéral président des riches, ont bien du mal à s’en démarquer sinon pour se rapprocher de la force qui les talonne, en lui emboîtant le pas souverainiste et identitaire, sans toucher aux logiques de gestion libérales.
Comment dès lors, les mobilisations sociales cesseraient-elles ? Le président a sans doute la parole facile mais l’audition laisse à désirer. Il va falloir hausser le son et l’exprimer bientôt aussi dans les urnes.
Concernant le logement social, la conjoncture ne va pas mieux. Les populations les plus fragiles en sont les premières concernées. Le “grand” débat ne les a guère passionnées. Le droit à un logement digne et accessible pour chacun reste à conquérir.
Et Macron n’aura pas arrêté l’expression des gilets jaunes, du peuple d’en-bas qu’il a cherché à discréditer. En pure perte. Sa loi “anticasseurs” a même été désavouée par le conseil constitutionnel qui a rejeté l’abus de pouvoir donné aux préfets d’interdire de manifestation tel ou tel citoyen. Le droit de manifester est imprescriptible.
La fragilité du président n’en est que plus perceptible.
René Fredon
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