Il fallait voir -et entendre- les commentateurs patentés se demander, ce samedi 26, si c’était un demi-succès ou un demi échec ? Alignant, ici, les chiffres comparés de la préfecture avec ceux des manifestants. Là, mettant l’accent sur le fait que les grands leaders étaient dispersés, se résignant à admettre que les incidents et violences sont restées très marginales…bref minimisant autant que possible la portée de cette journée de rassemblement contre la politique de Macron.

Un rassemblement où, depuis longtemps, syndicats (pas tous, on le savait), partis politiques (pas tous, on le savait aussi) et monde associatif très diversifié, se sont retrouvés ensemble pour donner plus de force à ce qui est en train de grandir : la résistance aux choix austéritaires de ce pouvoir au service de l’argent.

Et sans craindre d’appeler un chat, un chat : la dimension politique sans laquelle chacun reste sur son terrain, isolé, sous prétexte de ne pas être récupéré par telle ou telle idéologie…Comme si les salariés, les paysans, les chômeurs, les étudiants, les retraités, les petits entrepreneurs même…n’étaient pas confrontés et victimes de choix politiques délibérés et clairement identifiés comme très libéraux.

Macron qui se veut le meilleur élève et même le leader d’une Europe en crise au service des multinationales, répond aux légitimes colères des peuples, à leurs désillusions, qu’il faut amplifier les mêmes orientations creusant les inégalités et allet vers le fédéralisme pour “être encore plus forts”, c’est-à-dire plus soumis aux exigences de rentabilité des actionnaires, fondement de la loi des marchés.

La folie, disait Einstein, c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent.”

 C’est bien parce qu’il est attaché à un dogme, celui du capitalisme comme fin de l’histoire dont il feint de ne pas voir les limites, les conséquences sociales et environnementales à court terme évidentes, que Macron persiste et signe dans la fuite en avant sabordant notre modèle social livré à des privatisations qui aggravent la soumission aux intérêts privés, en même temps que les injustices et les inégalités insupportables pour les populations les plus délaissées, souvent les plus désespérées.

Et c’est bien sur le terrain politique, prolongeant les luttes syndicales et citoyennes, que se trouve la solution à la fois immédiate  créant un rapport de forces contraignant le pouvoir à entendre les colères du peuple et à en prendre la mesure. Alors qu’il campe sur ses certitudes et sa suffisance. Par exemple, il dit ignorer le vote des cheminots à 95% contre sa réforme, soutenue aussi par la droite, ne le perdons pas de vue.

Solution débouchant sur un autre projet de société démocratique, sociale, écologique, pacifique...à construire parallèlément par tous les acteurs. à commencer par les citoyens eux-mêmes.

C’est cette convergence des luttes qui est mise désormais en perspective par cette marée…montante incontestable. Elle caractérise cette première démonstration de force et de conscience que traduit cette grande mobilisation populaire très décentralisée.

Elle est le signe d’une volonté d’unité des victimes du “macronisme” en cours qui n’est que  l’accélération des politiques libérales précédentes, unité pour refuser les reculs sociaux à l’ordre du jour et pour développer les services publics, unité pour construire une alternative progressiste de transformation sociale libérée de la dictature des marchés.

Macron a déjà reculé en annonçant la reprise de la dette de la SNCFà hauteur de 35 milliards sur les 54 au total. Mais nul n’est dupe. Il cherche à travers ce geste à faire passer tout le reste et à donner un prétexte à certains syndicats, pressés de renoncer au combat sur l’essentiel : le changement de statut des cheminots et de la société pour la livrer aux actionnaires privés.

Mais c’est justement ça qui ne marche pas, sauf pour les détenteurs de capitaux. Moins de garanties et de droits pour les salariés, moins d’emplois cela fait plus de chômage et de précarité. Et la France est le pays où les profits des plus riches ont augmenté le plus dans les dernières années. Macron va au-devant de leurs exigences.

Le dialogue social est un leurre, comme l’est le concept de “partenaires” sociaux ! Non pas qu’il ne faille pas dialoguer et obtenir des employeurs des avancées salariales et sociales si le rapport des forces le permet. Mais se voir imposer des réformes qui vont à l’encontre des intérêts des salariés, accepter de réduire les aides sociales et laisser augmenter les cadeaux fiscaux pour les riches, ça n’est pas acceptable : c’est une conception ultraconservatrice de la société. Le contraire de la modernité.

Pour celles et ceux qui n’ont que leur force de travail à louer, c’est “à tous les coups on perd”  et il ne faudrait pas le dire haut et fort sous peine d’être accusé de faire de la politique ? On laisserait aux prédateurs leurs privilèges et le soin de diriger la société et ses institutions en fonction de leurs seuls intérêts ?

On en reviendrait là, au pays de la Révolution et des Droits de l’Homme, du Front populaire et de la Libération, de mai 68 et de tous les acquis des luttes ?

On est au XXIè siècle et les rapports sociaux comme les technologies, la productivité, le travail… ont profondément évolué, nous dit-on. Précisément, il n’y a jamais eu autant de richesses de créees et elles n’ont jamais été aussi inégalement réparties. Et à quel prix pour  la planète ?

Ce qui n’a pas évolué c’est que ces richesses colossales, fruit du travail des hommes, restent la propriété d’une infime minorité qui détient les pouvoirs économiques, politiques et médiatiques et qui s’arc-boute pour les conserver. Pas du tout pour les partager à partir de l’intérêt général. Seulement en fonction de leur taux de rentabilité pour les propriétaires d’actions.

Il y a encore bien des étapes à franchir mais celle du 26 mai comptera quoiqu’en disent les oiseaux de mauvaise augure.

René Fredon

 

 

 

 

 

 

 

Marée ou pas :La convergence des luttes en mouvement !

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