Moins de monde a Toulon , Une manif qui fait problème
La manifestation à Toulon était nettement moins nourrie que le samedi précédent : de moitié environ. Un cortège s’est formé après quelques discours sélectifs très souverainistes et surtout anti-vaccins dont celui d’Alexandre Juving-Brunet capitaine de gendarmerie en réserve, stigmatisant de la fontaine un drapeau noir et invitant la foule à isoler les drapeaux suspects en s’asseyant en cours de cortège, ce qui fut fait sur-le-champ !
Plus que le passe sanitaire c’est bien l’hostilité à la vaccination qui dominait dans une foule sans masques à 95% ! Les “organisateurs” ont annoncé 25 000 personnes ? La police n’a pas démenti. C’est très généreux car il y en avait beaucoup moins. Quelques groupes avec le drapeau rouge ou la chasuble CGT, peu de gilets jaunes visibles. Des doutes s’expriment quant à la coloration politique du leader.
La banderole de tête : “sauvons le peuple, sauvons la France…comité de salut public” dépasse le cadre de la gestion de la pandémie. Une référence à la Révolution de 1789 mais avec des relents de campagne présidentielle cherchant à brouiller les cartes comme on sait le faire à l’extrême-droite dont le cœur bat pour les Chouans et la royauté.
Serait-ce une coïncidence mais deux jours avant, le 12 août, F. Philippot était à Hyères où il s’est adressé à plusieurs centaines de personnes en tant que leader des “Patriotes” et candidat à la présidentielle.
Le même jour VM consacrait deux pleines pages à l’extrême-droite : la 4 à “ces maires RN qui refusent de contrôler le pass sanitaire” à l’image de celui de Fréjus et la 5 à Philippot “contre la gestion tyrannique de la crise” ! Belle pub, même si le préfet a eu droit à quelques lignes pour “dénoncer une manœuvre politicienne” et Philippot quelques vérifications sur ses méconnaissances médicales en bas de page.
L’extrême-droite était bel et bien mise en vedette, comme pour en faire la principale “résistance” au passe-sanitaire ?? Macron rêve d’avoir l’extrême-droite au second tour.
Philippot a pu dire que ses adversaires principaux étaient ceux qui étaient au pouvoir tout en expliquant qu’il avait quitté le FN fin 2017 “parce qu’il a arrêté de défendre le frexit“. Il a donc repris le flambeau du père-fondateur : sortir de l’Europe et de l’euro et pris la posture de l’opposant résolu au passe-sanitaire jusqu’au boycott des espaces qui l’exigent. Il avait à ses côtés l’avocat très médiatique Me Di Visio, fervent anti-vaccins qui a appelé à la “bonne attitude: la désobéissance vaccinale”. Il y en a pour tous les goûts !
Philippot n’était pas à Toulon le 14 août, il manifestait à Paris aux côtés de Dupond-Aignan choisi, en 2017, par Mme Le Pen comme 1er ministre. Mais il y a ses relais et une certaine influence des idées de la droite extrême à Toulon et dans la région, y compris au sein des LR auquel appartenait le leader du RN aux régionales !
Leur préoccupation : faire feu de tout bois contre “l’oligarchie” sans toucher à ses privilèges ni au capitalisme à fortiori. Donc faire semblant d’être de toutes les colères pour mieux les détourner vers des gestions ultra-libérales encore plus anti-sociales, plus sécuritaires, plus nationalistes…s’il est possible. En bons adeptes de…Trump.
Jezebel, la militante du comité d’action et de lutte (CAL83) a fait preuve de courage en prenant la parole, avec sa sono, aux abords du kiosque à journaux entourée de militants CGT-cheminots entr’autres, pour défendre les idées anticapitalistes : “il ne faut pas que le seul discours qu’ils entendent soit celui des fachos…occupons le terrain, on se bat depuis des années pour la défense des services publics…si l’hôpital n’avait pas été aussi dégradé, s’il y avait eu assez de soignants et de lits on n’en serait pas là…”
Des propos qui n’ont pas plu à tout le monde, un élu RN ayant cru pouvoir chatouiller la CGT s’est ravisé mais la cohabitation paraît de plus en plus improbable.
Le débat vif au sein des partis de gauche et des syndicats les plus combatifs s’exprime sur les réseaux sociaux et traduit une réelle interrogation sur l’attitude à avoir vis-à-vis d’une manifestation à l’évidence pilotée par l’extrême-droite même si ça n’est pas ouvertement assumé, elle se prétend “au service du peuple” en lui ouvrant ses bras pour mieux l’étouffer.
Désormais les plus observateurs savent à quoi s’en tenir sur la stratégie des “organisateurs «auto-proclamés qui cherchent à en faire un tremplin politique. Reste à en convaincre les manifestants, du moins ceux qui n’ont pas d’arrière-pensées politiciennes, mais des objectifs concrets contre le passe-sanitaire, pas contre la vaccination mais contre l’obligation et les discriminations qui s’ensuivent.
D’autant que la gestion de la pandémie, depuis le début, relève de l’improvisation et de décisions ultra-centralisées au gré des intérêts politiques de celui qui les prend, c’est-à-dire en vue de favoriser sa réélection grâce à l’état d’urgence qui se perpétue et mutile le débat démocratique : pourvu qu’on lui en sache gré et qu’il poursuive sa politique de démantèlement des services publics et des conquis sociaux pour durcir son asservissement aux grands intérêts privés, au capital.
Le peuple paie et paiera l’addition ! A méditer, l’avenir reste à écrire.
René Fredon