L’actualité ne cesse de nous alerter sur la menace que ferait peser la Corée du Nord sur la sécurité dans le monde, donc sur la paix. Nul besoin d’être solidaire de ce pays et de son système fort peu démocratique et fermé au monde, pour se demander s’il ne faudrait pas mieux, plutôt que des sanctions économiques qui l’isoleront davantage, s’interroger sur la question de savoir qui détient la suprématie absolue en matière de capacité militaire et nucléaire ?
Et pourquoi les puissances nucléaires n’ont pas participé à l’élaboration ni donc ratifié le traité d’arrêt “du développement, du stockage et de la menace d’utilisation des armes atomiques et thermonucléaires” adopté par 122 Etats (1 voix contre) en juillet 2017 dernier à l’ONU ?
“Pas réaliste…utopique…dangereux…pas le moment de renoncer à ces armes de dissuasion, par ces temps de montée du terrorisme et des conflits latents sur tous les continents”…argumentent les détenteurs d’armes nucléaires, comme la France. Mais d’où viennent ces centaines de milliers de migrants, sinon des pays à feu et à sang où se jouent la maîtrise des richesses et le pouvoir de potentats et de groupes terroristes se réclamant de l’islam, instrumentalisant leur religion.
Et puis, accessoirement, rappelons-nous : qui, seul, s’en est servi ? Et qui continue, avec à sa tête un président aussi imprévisible que son homologue de Corée du Nord, à montrer ses muscles et sa capacité nucléaire, son occupation, à travers l’OTAN, de l’espace terrestre, maritime, aérien, spatial ?
C’est d’ailleurs pour cela que la Corée du Nord, tenant le même raisonnement, considère les Etats-Unis comme une nation hostile et pour s’en prémunir, elle a aussi sa propre dissuasion nucléaire, comme l’expliquait récemment le président de l’association française d’amitié franco-nord-coréenne. (Var-matin 6/9/17)
Il n’est pas inutile de rappeler que sur les quelques 17 000 têtes nucléaires en possession de neufs pays, les Etats-Unis et la Russie en possèdent, en gros, 8 000 chacun, la France 300, la Corée du Nord…une dizaine.
Mais direz-vous, une seule suffit pour provoquer un désastre des centaines de fois plus fort que les deux bombes A larguées sur Hiroshima et Nagasaki à trois jours d’intervalle.
Trump n’entend pas perdre le leadership de première puissance nucléaire, les autres la veulent aussi à des fins exclusives de dissuasion disent-ils et personne ne veut désarmer unilatéralement. Ce qui sert de justification à la course aux armements les plus sophisqués et les plus “performants”. On peut même en réduire le nombre s’ils sont plus perfectionnés et qu’un pays dispose des vecteurs les mieux adaptés à leur usage ! Il y avait eu une amorce de désescalade avec le traité de non prolifération des armes nucléaires.
Comment sortir de cette “logique” de guerre froide née au temps où s’affrontaient deux grands blocs, occidental et URSS qui, disent les “réalistes”, nous vaut de n’avoir plus connu d’usage de cette arme beaucoup plus destructrice que celles utilisées en 1945 ? Certes mais ont-elles dissuadé les belligérants qui s’affrontent à travers le monde, sur tous les continents ? Pas du tout.
Au nom de ce raisonnement, on joue avec le feu, c’est le cas de le dire. On augmente les risques de voir des Etats se “protéger” jusqu’à ce que l’un deux s’en serve ou qu’une erreur de commandement se produise !
Faudrait-il que les peuples acceptent cette perspective et les sommes vertigineuses englouties dans les dépenses militaires sans cesse plus coûteuses ? Au détriment du développement de tous les pays, de la protection de la planète, de l’éducation, de la santé, de la culture, de la coopération… de l’émancipation des peuples.
Par exemple, est-ce parce qu’Israël possède un arsenal nucléaire qu’il s’arroge le droit d’occuper la Palestine et d’y installer des colonies protégées par son armée ? Annexions qui signifient violences imposées aux populations palestiniennes chez elles ! Cela dure depuis des décennies et cette colonisation par le gouvernement israëlien, maintes fois condamnée par l’ONU, est encouragée par la neutralité bienveillante des Etats-Unis qui s’assimile davantage à de la complicité.
Une situation qui a des incidences directes au Moyen-Orient et qui nourrit en partie le terrorisme. Netanyahu a le cynisme de soutenir la création d’un Etat Kurde alors qu’il occupe en grande partie le territoire palestien et refuse la création d’un Etat indépendant dont le principe est reconnu par une très grande majorité d’Etats ! Il ne fait qu’attiser les dissensions entre les Etats arabes au-delà de cette zone de conflits .Ce n’est qu’un exemple. La liste des conflits armés à travers le monde est impressionnante. Il faut dire que le marché des armes, des plus classiques aux plus sophistiquées, n’a jamais été aussi florissant et ce sont les “grandes” puissances, dont la France et les entreprises qui en tirent des profits colossaux. Ils s’en félicitent d’ailleurs…puisque c’est pour notre protection et il avancent même des raisons économiques et sociales, pour se donner bonne conscience.
Avec 5% des dépenses militaires mondiales il y aurait de quoi, en 10 ans, résoudre l’accès à l’eau, la fin de la malnutrition, l’accès aux soins, à l’éducation…dans le monde selon le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) qui consiste à éradiquer la pauvreté dans le monde tout en protégeant la planète…Le financement n’est pas au rendez-vous parce que le capitalisme et le productivisme qui en découle, font de ce marché des armes l’un des plus rentables et, par conséquent, ses séides dans les gournements n’ont pas la volonté politique de promouvoir la culture de paix mais celle des affaires. Il y a pourtant beaucoup mieux…à faire !
La recherche du plus fort dividende pour les détenteurs de capitaux est à l’opposé des conditions qui permettraient de jeter les bases d’un monde solidaire.
Il ne s’agit pas de demander à un seul pays de donner l’exemple pendant que les autres prendront de l’avance. Mais, ensemble, les neuf puissances nucléaires à commencer par celles (Etats-Unis et Russie) qui disposent de 90% du stock d’ogives nucléaires, devraient être à l’initiative d’un désarmement progressif et contrôlé, jusqu’à l’abolition des armes nucléaires. Elles s’y refusent !
Comme l’écrit le Mouvement de la paix, à la veille de la journée mondiale du 21 septembre pour l’aboltion des armes nucléaires et la Paix : “la guerre est toujours un échec. Elle conduit au chaos et enfante des monstruosités dont sont victimes les populations civiles jetées sur le chemin de l’exil.
Il est nécessaire d’agir pour obtenir des politiques sociales, économiques, culturelles et de paix s’inspirant de la charte des Nations Unies et des huit domaines de la culture de la paix définis par l’Unesco afin de contribuer à la construction d’un monde de justice, de solidarité, de fraternité, de Paix ! “
Là encore tout dépend de la mobilisation des peuples, en particulier de ceux des pays dilapidant des sommes colossales -comme la France- pour disposer d’un armement nucléaire “à la hauteur” et suffisant pour se croire à l’abri. Pour imposer à Macron d’autres choix que le surarmement nucléaire.
Il ne s’agit pas de laisser faire le terrorisme islamo-fasciste mais de le combattre pour en tarir la source et imposer d’autres rapports qu’exclusivement militaires avec les pays en conflits. Seule l’ONU est en mesure d’avoir l’autorité nécessaire si tous les Etats la lui donnent et que les plus forts militairement ne se substituent pas à elle en s’érigeant en gendarmes du monde.
On n’en est loin et les intérêts égoïstes des puissances dominantes (G8, G20) doivent céder le pas à l’exigence des peuples d’un monde sans guerre, sans armes de destruction massive au-dessus de leurs têtes. A un monde de paix qui passe aussi par l’exclusion de la misère et de toutes les inégalités. Par un développement durable qui en finisse avec le saccage de la planète.
Telle est la signification de l’appel de l’ICAN (association internationale pour l’abolition des armes nucléaires) qui rassemble des centaines d’associations, mouvements et partis en France pour faire du 21 septembre et autour, une journée mondiale de sensibilisation à ce qui paraît aujourd’hui utopique et qui peut devenir, par l’action de tous, LA réalité de demain.
René Fredon